Nouvelles formes de travail : quel impact pour votre retraite ?
15/04/2024
2,3
millions de pluriactifs en 2015
Entre le statut d’indépendant et celui de salarié, il existe toute une série de situations intermédiaires qui attirent un nombre croissant de personnes. En 2015, le nombre de pluriactifs qui cumulent plusieurs activités simultanément s’élevait à 2,3 millions. Certaines de ces formes de travail sont déjà anciennes, comme l’intérim, d’autres sont apparues plus récemment, comme le portage salarial ou le micro-entrepreneuriat. Chacun a son mode de fonctionnement propre, avec des conséquences différentes en matière de retraite. Quelles sont les principales caractéristiques de ces nouvelles formes de travail, et quelles sont leurs différences ?
De nouvelles façons de travailler au XXIe siècle
Un monde du travail en transformation.
Le Contrat à durée indéterminée (CDI) reste largement la règle en France. Selon l’Insee, 9 personnes en emploi sur 10 sont salariées, et 85 % d’entre elles sont en CDI. Cette proportion n’a pas beaucoup bougé depuis les années 2000. Pour autant, cette apparente stabilité dissimule des changements importants : des formes alternatives d’emploi tendent à se développer. En 2015, on comptait par exemple 2,3 millions de « pluriactifs », c’est-à-dire des personnes cumulant soit plusieurs emplois salariés, soit un emploi salarié et une activité indépendante. Si le nombre de personnes en CDD n’augmente pas beaucoup, la durée moyenne de ces contrats a été divisée par 2 depuis le début des années 2000.
Dans le même temps, l’entrepreneuriat attire de plus en plus les nouvelles générations. D’après un sondage OpinionWay, plus de la moitié des jeunes de 18 à 30 ans aimeraient créer leur entreprise, 16 % d’entre eux l’ont même déjà fait (création ou reprise) ! Pouvoir travailler d’où l’on veut, être maître de son organisation, ne pas avoir de hiérarchie… Nombreux sont les jeunes et les moins jeunes qui aspirent à ces avantages.
Pour autant, il n’est pas toujours évident de se lancer. Obtenir facilement un prêt, une location, bénéficier d’une couverture sociale en cas de chômage, préserver de meilleurs droits à la retraite sont autant de bénéfices du salariat auquel beaucoup ne souhaitent pas renoncer.
Les nouvelles formes de travail
Plusieurs types de statuts se sont développés ou ont pris de l’importance ces dernières années pour essayer de concilier flexibilité et besoin de compétences pour l’entreprise, sécurité et indépendance pour le salarié.
L’intérim
Le travail temporaire existe depuis les années 1950, mais il s’est particulièrement développé au cours des dernières décennies. Il représente aujourd’hui environ 3 % des personnes en emploi, soit aux alentours de 700 000 à 800 000 personnes.
L’intérimaire a le statut de salarié. Son employeur est la société de travail temporaire (ou agence d’emploi) qui le recrute, lui trouve une mission et l’envoie en entreprise pour une durée limitée. La durée maximum, sauf exception, est de 18 mois. Il n’est pas rémunéré entre les missions, sauf dans un cas particulier : celui du CDI intérimaire. Avec ce nouveau type de contrat, proposé par les entreprises de travail temporaire depuis 2014, les salariés sont envoyés en mission d’intérim, mais ils sont rémunérés également pendant les périodes intermédiaires. Fin 2018, plus de 33 000 personnes* bénéficiaient de ce statut.
*Source : Dares
Le portage salarial
Le cadre juridique du portage salarial a été fixé en 2008, même si la pratique remonte à la fin des années 1980. Près de 90 000 personnes ont adopté ce statut, d’après la Fédération des entreprises de portage salarial (FEPS).
Le portage tient à la fois de l’entrepreneuriat indépendant et du salariat. Techniquement, si vous optez pour le portage salarial, la société de portage sera votre employeur. Vous bénéficiez donc du statut de salarié. En revanche, c’est à vous de constituer votre portefeuille de clients. La société de portage vous reverse, sous forme de salaire, les montants que vous avez négociés. Elle gère tout l’aspect administratif, social et fiscal. Les mois où le salarié n’a pas d’activité, il ne perçoit rien.
Le micro-entrepreneuriat
Le statut d’auto-entrepreneur a été créé en 2008. En 2016, il a fusionné avec le statut fiscal de la micro-entreprise : on parle donc aujourd’hui de micro-entrepreneur. Au 2e trimestre 2018, 776 000 micro-entrepreneurs déclaraient un chiffre d’affaires.
Il s’agit d’un statut d’indépendant simplifié. Le micro-entrepreneur facture ses clients, et verse chaque mois ou chaque trimestre un pourcentage de son chiffre d’affaire à l’Urssaf. Le statut peut convenir aussi bien à une activité occasionnelle qu’à une activité à temps plein. Le chiffre d’affaires est plafonné à 70 000 € pour les prestations de services et à 170 000 € pour le commerce.
Autres solutions
Il existe encore d’autres statuts de travail « atypiques ».
Les groupements d’employeurs proposent à leurs salariés des contrats en temps partagé dans des entreprises où ils sont détachés. Il peut s’agir, par exemple, de 2 contrats à mi-temps chez 2 employeurs différents, ou de 2 contrats saisonniers qui se complètent sur l’année. S’il est en CDI, le salarié est payé entre les missions. Environ 40 000 personnes travaillent sous ce statut en France. En tant que salarié d’un groupement d’employeur, vous êtes affilié au régime général, et vous accumulez des droits à la retraite comme n’importe quel salarié.
Il existe aussi des coopératives d’activité et d’emploi, qui relèvent de l’économie sociale et solidaire. Elles proposent un statut d’entrepreneur-salarié pour accompagner la création d’entreprise. Plus de 7 000 personnes travaillent sous ce statut. Les entrepreneurs-salariés cotisent au régime général pour leur retraite (ainsi que pour la Sécurité sociale et le chômage).
Intérim, portage, micro-entrepreneuriat : quelles différences ?
L’intérim
Quel statut ?
En intérim, vous vous inscrivez auprès d’une entreprise de travail temporaire (ou de plusieurs, si vous le souhaitez). Celle-ci recherche des missions correspondant à vos compétences. Lorsqu’elle vous trouve un emploi auprès d’une entreprise (dite « entreprise utilisatrice ») – et que vous l’acceptez – vous concluez un contrat de mission avec l’entreprise de travail temporaire. Il s’agit d’un type particulier de contrat de travail, qui ne peut pas durer plus de 18 mois (sauf dans certains cas). La durée doit être définie au départ, sauf exception, notamment si vous remplacez un salarié absent. Entre les missions, vous n’êtes pas rémunéré, et vous n’êtes pas en contrat avec la société d’intérim.
Depuis 2014, il existe également le CDI intérimaire, réservé à certains salariés sélectionnés par les entreprises de travail temporaire. En CDI intérimaire, vous restez salarié de l’entreprise d’intérim entre les missions, en percevant une rémunération minimale fixée dans le contrat.
Quelle rémunération ?
Le salarié en intérim perçoit un salaire net versé par l’entreprise de travail temporaire. Celle-ci facture à l’entreprise utilisatrice un montant qui représente votre salaire, vos charges et une marge.
En fin de mission, vous percevez :
- une indemnité de précarité égale à 10 % du salaire perçu (sauf si vous êtes embauché en CDI par l’entreprise utilisatrice ou par une autre entreprise) ;
- une indemnité de congés payés égale à 10 % du salaire et de l’indemnité de précarité.
L’entreprise de travail temporaire acquitte donc vos charges pour vous et s’occupe de toutes les formalités administratives, comme n’importe quel employeur.
Quels impôts et charges ?
Votre salaire, y compris les indemnités de précarité et de congés payés, est taxé comme celui d’un salarié normal. L’impôt sur le revenu est prélevé chaque mois, ainsi que la CSG-CRDS et les charges sociales (salariales et patronales) : maladie, maternité, accidents du travail, retraite de base et complémentaire. Vous cotisez également pour le chômage, et pour votre mutuelle santé complémentaire (obligatoire désormais, sauf si vous êtes couvert par ailleurs).
Quelles conséquences de l'intérim pour la retraite ?
Les rémunérations que vous percevez étant des salaires, vous acquittez des cotisations retraite au régime général et à l’Agirc-ArrcoAgirc-Arrco<p>Régime unique de retraite complémentaire pour les salariés du privé (cadres et non-cadres) depuis le 1er janvier 2019. Il fonctionne par points.</p>, y compris sur les indemnités de précarité et de congés payés. Vos droits à la retraite sont calculés de la même façon que pour un salarié en CDD ou en CDI.
Vous validez donc 1 trimestre de cotisation à chaque fois que vous gagnez 150 fois le Smic horaire en salaire brut (soit 1 747,50 € € en 2024, et 6 990 € € pour 4 trimestres). Si vous avez beaucoup de missions bien rémunérées, vous pouvez augmenter le montant de votre salaire annuel moyen (la moyenne de vos 25 meilleures années), et donc votre pension de retraite. L’ensemble de votre rémunération vous donne également droit à des points de retraite complémentaire qui accroissent votre pension Agirc-Arrco.
Le portage salarial
Quel statut ?
Vous êtes salarié de l’entreprise de portage, en contrat à durée déterminée ou indéterminée. Les entreprises auprès desquelles vous effectuez vos missions sont en contrat commercial avec la société de portage, et c’est elle qui facture.
Vous n’êtes pas rémunéré entre les missions, même si vous restez salarié de l’entreprise de portage. Si vous ne trouvez pas de clients, le contrat peut être rompu.
Quelle rémunération ?
La société de portage vous verse, sous forme de salaire net, environ la moitié du chiffre d’affaires facturé à l’entreprise cliente, sur lequel elle prélève une commission.
Elle règle pour vous les organismes sociaux et s’occupe de tous les aspects administratifs.
Quels impôts et charges ?
Votre salaire est imposé et soumis à cotisations sociales comme celui d’un salarié normal. L’impôt sur le revenu est prélevé à la source chaque mois (lorsque vous percevez un salaire), ainsi que la CSG-CRDS et les charges sociales (salariales et patronales) : maladie, maternité, accidents du travail, retraite de base et complémentaire. Vous cotisez également pour le chômage, et pour la mutuelle santé complémentaire (sauf si vous êtes couvert par ailleurs).
Quelles conséquences du portage salarial pour la retraite ?
Vos rémunérations sont des salaires, et comptent pour la retraite du régime général, de la même façon que si vous étiez salarié au régime normal ou en intérim
(voir ci-dessus).
En savoir plus sur la retraite et le portage salarial
Le micro-entrepreneuriat
Quel statut ?
La micro-entreprise est un cas particulier de travail indépendant. S’inscrire au statut de micro-entrepreneur revient à créer une entreprise individuelle, sans salariés. Vous disposez d’un numéro SIRET, comme toutes les entreprises. Vous êtes votre propre patron, et vous travaillez pour vos clients.
Quelle rémunération ?
Vous facturez directement vos clients.
Tous les mois ou tous les trimestres (au choix), vous déclarez le montant de votre chiffre d’affaires à l’Urssaf via le portail www.autoentrepreneur.urssaf.fr. Vous acquittez en même temps le montant de vos charges sociales, et éventuellement l’impôt sur le revenu (voir ci-dessous). Vous connaissez ainsi chaque mois votre revenu net. Les montants que vous versez sont définitifs et ne seront pas régularisés ultérieurement, comme c’est le cas au régime « réel » d’entrepreneur individuel.
Vous devez ouvrir un compte bancaire dédié à votre activité de micro-entrepreneur.
Votre revenu est plafonné à 70 000 € si vous exercez une activité de services ou une profession libérale, à 170 000 € si vous êtes commerçant.
Quels impôts et charges ?
Les revenus de micro-entrepreneur sont soumis à l’impôt sur le revenu. Celui-ci peut être prélevé de 2 façons :
- en prélèvement trimestriel sur votre compte en banque, depuis 2019. Il s’agit d’un acompte, calculé à partir de votre déclaration de l’année précédente, et qui donnera lieu à régularisation ;
- Sous forme de versement libératoire mensuel ou trimestriel. Dans ce cas, vous payez l’impôt sur le revenu en même temps que vos charges sociales, à un taux compris entre 1 % et 2,2 % du chiffre d’affaires déclaré suivant votre activité. Cette faculté n’est proposée qu’en dessous de certains plafonds de revenu du foyer.
Vous acquittez également les charges sociales, soit 12,8 % du chiffre d’affaires si vous êtes commerçant et 22 % si vous êtes dans le service ou les professions libérales. Il s’y ajoute entre 0,10 % et 0,30 % pour la formation professionnelle.
Ces charges comprennent la CSG-CRDS, l’assurance maladie-maternité, les allocations familiales et la retraite de base et complémentaire. Elles ne comprennent donc pas le chômage, ni la mutuelle complémentaire santé.
Il faut également acquitter la Contribution économique territoriale (CFE et CVAE).
Si vous facturez annuellement plus que 33 200 € (dans les services) ou 82 800 € (dans le commerce), vous êtes soumis à la TVA. Cela signifie que vous devrez facturer vos prestations 20 % de plus, et reverser ces 20 % à l’Etat.
Quelles conséquences du micro-entrepreunariat pour la retraite ?
En tant que micro-entrepreneur, vous cotisez bien pour votre retraite, mais à un autre régime que celui des salariés.
La validation des trimestres s’effectue suivant des règles particulières : le montant de chiffre d’affaires qu’il faut avoir facturé pour valider 1, 2, 3 ou 4 trimestres varie suivant le type d’activité.
Depuis 2019, la caisse de retraite à laquelle vous êtes affilié en tant que micro-entrepreneur est :
- La SSI (Sécurité sociale des indépendants, ex-RSI) si vous êtes artisan, commerçant ou exercez une profession libérale non règlementée ;
- La Cipav (section de la CNAVPL) si vous exercez une profession libérale réglementée.
Ces caisses prélèvent des cotisations moins élevées que le régime général des salariés, et versent donc des pensions plus basses à revenu égal.
En savoir plus sur la retraite des micro-entrepreneurs
Ce qu’il faut retenir sur l’impact des nouvelles formes de travail pour votre retraite
En France, près du ¼ des actifs en emploi ne travaille pas en CDI. 2,3 millions de Français sont pluriactifs, et environ 1,6 million ont choisi des alternatives comme le micro-entrepreneuriat, le portage salarial ou l’intérim.
L’intérimaire est un salarié d’une entreprise de travail temporaire, en contrat de mission dans une entreprise cliente.
Le micro-entrepreneur est un travailleur indépendant. Les formalités administratives sont plus exigeantes que pour le portage salarial et l’intérim, mais plus simples qu’au statut d’entrepreneur individuel normal.
Le portage salarial est un mixte entre le statut d’indépendant et celui de salarié. La personne démarche elle-même ses clients, mais c’est la société de portage qui lui verse son salaire et s’occupe des formalités administratives et fiscales.
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