Professionnels de santé hospitaliers : impact des mesures d’urgence du Covid-19 sur votre retraite

Professionnels de santé hospitaliers : impact des mesures d’urgence du Covid-19 sur votre retraite

En 1ère ligne face à l'épidémie de Coronavirus, les professionnels hospitaliers ont fait preuve d'une abnégation sans limite pour protéger et soigner la population. Cette mobilisation sans précédent s'est notamment traduite par une très forte accumulation d'heures supplémentaires.

De plus, en reconnaissance de « l'incroyable dévouement de tout le personnel soignant », pour reprendre les mots du Premier ministre, une prime exceptionnelle leur a été attribuée. Le montant de cette prime réservée aux agents de santé hospitaliers varie de 500 € à 1 500 € selon la localisation de l'établissement d'exercice. Ces revenus exceptionnels auront-ils un impact sur votre retraite ?

Covid-19 : quels agents hospitaliers sont éligibles à la prime exceptionnelle de 1 500 € ?

Vous y avez droit, que vous soyez médecin, infirmier, agent de service ou interne, si vous avez travaillé :

  • soit dans l'un des 40 départements les plus touchés ;
  • soit dans l'un des 108 établissements de référence.

Les 40 départements concernés sont les suivants :

Aisne, Ardennes, Aube, Bas-Rhin, Bouches-du-Rhône, Corse-du-Sud, Côte-d'Or, Doubs, Drôme, Essonne, Eure-et-Loir, Haute-Corse, Haute-Marne, Haute-Saône, Haute-Savoie, Haut-Rhin, Hauts-de-Seine, Jura, Loire, Marne, Mayotte, Meurthe-et-Moselle, Meuse, Moselle, Nièvre, Nord, Oise, Paris, Pas-de-Calais, Rhône, Saône-et-Loire, Seine-et-Marne, Seine-Saint-Denis, Somme, Territoire de Belfort, Val-de-Marne, Val-d'Oise, Vosges, Yonne, Yvelines.

Les 108 établissements de référence :

Ces établissements sont constitués des 70 sièges de SAMU et des 38 centres hospitaliers suivants :

Quels agents de santé hospitaliers sont éligibles à la prime exceptionnelle de 500 € ?

Vous y avez droit si vous êtes un professionnel de santé et que vous ne remplissez pas les conditions pour la prime de 1 500 € (l'un des 40 départements ou des 108 établissements de référence).

Toutefois, si vous n'avez droit qu'à une prime de 500 €, le responsable de votre établissement peut porter son montant à 1 500 € si vous avez fait partie des agents impliqués dans la prise en charge des patients contaminés par le Coronavirus ou que vous avez été particulièrement mobilisé ces derniers mois.

Les montants exprimés sont nets car les primes sont exonérées de cotisations et d'impôt sur le revenu.

Attention, si l'agent s'est absenté, du 1er mars au 30 avril :

  • 15 jours : la prime est réduite de 50 % ;
  • 30 jours : la prime n'est pas attribuée.

Si l'agent était en arrêt maladie ou en télétravail, cela n'est pas considéré comme une absence.

Comment sont rémunérées les heures supplémentaires des professionnels de santé hospitaliers en période de crise sanitaire ?

Faire face à l'afflux de malades du Coronavirus a exigé une mobilisation totale de l'ensemble des professionnels de santé. Concrètement, cela se traduit par le relèvement des heures supplémentaires du 1er février au 30 juin. Le nombre d'heures supplémentaires maximales que peut faire un professionnel de santé passe :

  • De 180 heures par an (220 pour certains personnels) à 240 pour tous ;
  • De 15 heures par mois (18 heures pour certains personnels) à 20 pour tous.

Les préfets et directeurs d'Agences régionales de santé (ARS) ont le droit de relever encore ce plafond si nécessaire « au regard des impératifs de continuité du service public ou de la situation sanitaire » (quoi qu'il arrive, un agent ne peut faire plus de 48 heures supplémentaires par semaine).

En retour et pour les récompenser de cet effort exceptionnel, tous les professionnels de santé hospitaliers bénéficient d'une majoration de 50 % du montant de leurs heures supplémentaires.

Prime exceptionnelle et heures supplémentaires : quel impact sur votre retraite ?

Ma prime exceptionnelle va-t-elle compter pour ma retraite ?

NON. Seules les primes qui font l'objet de cotisations sociales comptent dans le calcul de la retraite. Cette prime exceptionnelle étant exonérée de cotisations sociales, elle ne vous rapporte aucun droit à la retraite.

Mes heures supplémentaires vont-elles compter pour ma retraite ?

OUI. Les heures supplémentaires font partie de la rémunération des professionnels de santé, et sont à ce titre soumises aux cotisations sociales. Elles comptent donc pour votre retraite. Concrètement, les heures supplémentaires exercées se traduisent donc non seulement par une augmentation du revenu, mais également par une augmentation de la future pension de retraite complémentaire. Votre retraite de base, elle, n'est pas impactée.

Fonctionnaire ou praticien hospitalier ?

Les professionnels de santé exerçant à l'hôpital sont divisés en 2 statuts, avec des règles légèrement différentes pour la retraite.

Les médecins, psychiatres, biologistes, pharmaciens, chirurgiens, dentistes et odontologistes à l'hôpital sont des praticiens hospitaliers. Leur retraite de base est gérée par la CNAV (assurance vieillesse et leur retraite complémentaire par l'Ircantec.

Les autres professionnels exerçant à l'hôpital, y compris les professionnels de santé comme les infirmiers, sont des fonctionnaires hospitaliers. Leur retraite de base est gérée par la CNRACL et leur retraite complémentaire par le RAFP.

Les heures supplémentaires n'ont aucun effet sur la retraite de base des fonctionnaires hospitaliers (CNRACL) et peuvent en avoir un sur celle des praticiens hospitaliers (CNAV)

La retraite des fonctionnaires hospitaliers (CNARCL) représente 75 % de leur traitement brut des 6 derniers mois. La retraite des praticiens hospitaliers (CNAV) représente 50 % du salaire annuel moyen des 25 meilleures années. Elle peut être augmentée ou diminuée selon le nombre de trimestres acquis.

Vous accumulez des trimestres en cotisant sur votre revenu brut. En 2020, vous obtenez vos 4 trimestres (le maximum possible) en cotisant sur un salaire brut de 6 090 €. Sur la base d'une activité à plein temps, ce montant est le plus souvent atteint sans heures supplémentaires.

Si vous êtes praticien hospitalier, et que cette année comptera dans vos 25 meilleures années, les heures supplémentaires tireront légèrement la moyenne de vos revenus vers le haut, et donc votre pension de retraite.

Si vous êtes fonctionnaire hospitalier, même si la période de Covid-19 correspond à vos 6 derniers mois de carrière, les heures supplémentaires ne compteront pas dans le calcul de votre retraite de base. La règle de calcul des 75 % du traitement brut ne prend pas en compte les heures supplémentaires qui n'ont donc aucun impact sur votre retraite de base.

Les heures supplémentaires augmentent légèrement votre retraite complémentaire (Ircantec et RAFP)

L'Ircantec et la RAFP sont ce qu'on appelle des régimes à points. Vous accumulez des « points de retraite » proportionnellement aux cotisations retraite que vous payez. Au moment de partir à la retraite, ce stock est « converti » en pension de retraite complémentaire. Cela signifie que toute la carrière compte. Vos heures supplémentaires étant soumises à cotisations sociales, elles vous rapportent donc des points supplémentaires pour votre retraite.

Impact sur la retraite des primes exceptionnelles et heures supplémentaires : l'exemple de Inna

La situation d'Inna

Inna, infirmière en soins généraux en début de carrière au CHU de Toulouse, a effectué 20 heures supplémentaires par mois d'avril à juin 2020. Son salaire horaire brut est de 12,48 € (1 893,15 € par mois).

Le CHU de Toulouse où elle exerce fait partie des 108 établissements de référence. Elle a droit à la prime exceptionnelle de 1 500 €, qu'elle a normalement reçue dans son bulletin de paie de mai.

Chaque heure, payée 12,48 €, est majorée de 50 % (18,72 €). Sur 3 mois, son total de 60 heures supplémentaires x 18,72 € lui rapportent un gain total de 1 123,20 € (ou 374,40 € par mois). Elle devrait recevoir cette somme d'ici début septembre.

En additionnant les 3 mois d'heures supplémentaires et la prime exceptionnelle, l'implication d'Inna dans la lutte contre le Coronavirus lui aura permis de gagner = 2 623,20 € (1 123,20 + 1 500).

Le fonctionnement de sa retraite de fonctionnaire hospitalière

En tant qu'infirmière, et donc fonctionnaire hospitalière, le calcul de sa pension se fait à partir des règles de la CNRACL (retraite de base) et de la RAFP (retraite complémentaire).

La valeur d'acquisition du point RAFP, en 2020, est de 1,2452 €. Cela signifie que pour 1,2452 € de salaire brut, Inna acquiert 1 point de retraite. Les heures supplémentaires d'Inna lui ont rapporté 1 123,20 €. Cela représente donc 902 points RAFP supplémentaires (1 123,20 / 1,2452). La prime de 1 500 € étant exonérée de cotisations, elle ne rapporte pas de points de retraite.

A son départ en retraite, Inna multipliera le stock de points accumulés pendant toute sa carrière par la valeur de service du point qui sera alors en vigueur, pour obtenir le montant de sa pension complémentaire annuelle. Il est à ce jour impossible d'estimer la valeur de service du point lorsque Inna prendra sa retraite. Mais, pour avoir un ordre d'idée, si la valeur du point était équivalente à celle de 2020 (0,04656 €) cela représenterait une augmentation de 42 € par an (902 x 0,04656).

A la date d'aujourd'hui, les professionnels de santé hospitaliers ne savent pas jusqu'à quand ils pourront bénéficier de ces heures supplémentaires. Le gouvernement a annoncé qu'elles seraient en vigueur "pendant la durée de la crise". L'état d'urgence sanitaire se terminant le 10 juillet prochain, cette date sera-t-elle considérée comme la fin de la crise ? A ce jour, aucune certitude…

Mise à jour octobre 2020 : 

Reconnaissance de la maladie professionnelle

Un décret du 14 septembre 2020 a officialisé la reconnaissance du Covid-19 chez les soignants comme maladie professionnelle. Cela présente 3 avantages.

Le 1er avantage est l'allocation d'Indemnités journalières (IJ) en cas d'incapacité temporaire :
Exemple : un soignant infecté en septembre 2020 gagnait 3 500 € bruts en août 2020. Pour calculer ses IJ, il faut d'abord établir un salaire journalier de base qui représente le salaire brut divisé par 30,42 soit 115,05 €. Les IJ correspondent à une fraction de ce salaire journalier de base :

  • 115,05 € x 60 % soit 69,03 € pendant les 28 premiers jours ;
  • 115,05 € x 80 % soit 92,04 € à compter du 29e jour. Cependant les IJ ne peuvent dépasser un plafond journalier net équivalent à [3 500 - (3 500 x 21 %)] / 30,42 = 90,09 €. Ce dernier montant sera, dans ce cas, alloué.

Le 2e est l'allocation d'une rente viagère en cas d'incapacité permanente (attribuée aux ayants droits si le professionnel décède du Covid-19).

Le 3e, enfin, est la prise en charge totale des frais de santé.
 
La reconnaissance automatique est engagée si le professionnel de santé – dont la liste se trouve ici – a exercé son activité en présentiel – c'est-à-dire pas en télétravail – et a eu recours à une assistance ventilatoire. Ce dernier point a suscité la grogne des organisations syndicales qui ont pointé du doigt l'absence d'automatisation de la reconnaissance pour les professionnels ayant subi d'autres formes graves du virus comme l'atteinte du système nerveux. Pour ces derniers, c'est au Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) d'instruire les demandes.

Comment faire la demande ? Vous devez vous rendre sur le site declare-maladiepro.amelie.fr et joindre le certificat médical, le compte rendu d'hospitalisation et un justificatif de l'activité professionnelle et une copie du livret de famille du défunt si la demande est faite par l'ayant droit. 

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